Retour - Phase 2:
nostalgie et réalité
Durée: environ 3 mois

Après cette escapade parisienne, ce que j'appellerais la phase deux du retour ne s'est pas fait attendre...
Elle a coïncidé avec la reprise du travail. Hasard ou pas, c'est impossible à dire, mais j'aurais tendance à penser que la reprise du boulot n'y est pour rien car c'est ce qui m'a obligée à rester dans la réalité, à tenir. Travailler m'empêchait de trop penser.

Petit à petit, le fameux système de protection s'est attendri. Le voyage est devenu plus réel. La dimension parallèle dans laquelle il était resté figé s'est craquelée pour lui donner une existence dans cette dimension-ci.

C'était la phase la plus difficile. Elle a commencé par des bribes, des images qui m'assaillaient sans cesse. Des paysages lointains qui se superposaient à ceux de nos campagnes. Des champs de jeunes blés qui devenaient des rizières ; des collines qui devenaient des steppes parsemées de gers ; des villes qui se peuplaient d'un tourbillon de motos et de marchés chaotiques...
Et chacune de ces images me percutaient de plein fouet en laissant toujours une trace brûlante dans ma poitrine.

Lorsque j'étais seule, une bulle de nostalgie m'étourdissait.
J'ai commencé à trier mes photos. Lorsque je les regardais, je replongeais dans cette autre vie.
C'était la vie d'ici qui n'était plus si réelle et qui déménageait vers un autre espace-temps. Cette vie qui me semblait fade. Tellement fade. 
La couleur, l'animation, le mouvement, le bruit, les klaxons, les aboiements, la simplicité des échanges, ... tout me manquait et ça me faisait un mal de chien. 

 
    




J'étais paumée et de plus en plus décalée. Je ne savais plus comment penser ma vie. Je ne savais pas comment j'allais faire pour éprouver à nouveau du plaisir dans cette vie-ci. Tout ce qui me pesait avant était réapparu, rien n'avait changé. J'avais juste eu droit à une extraordinaire parenthèse. Et elle était terminée.
Ce projet qui m'avait tenue en haleine si longtemps était bel et bien fini.
J'avais l'impression d'être en veille, en attendant un retour à la vraie vie, au voyage.

Il aurait été simple à ce stade de repartir sur un autre projet pour retrouver un moteur... Mais aurais-je alors pu appréhender un autre retour?
Ou alors il fallait envisager une expatriation, mais ce n'est pas ce qui me convient... J'aime voyager, bouger, découvrir. Mais je ne suis pas persuadée qu'une vie sédentaire autre part me conviendrait mieux. Ce ne serait qu'une réplique de celle-ci, dans un autre cadre, soit, mais une réplique. Et qui plus est sans la famille et les amis.
Je devais donc trouver un moyen de fonctionner et d'être heureuse ici pour vivre sainement mes voyages.
Selon moi, un voyage ne doit pas être une fuite. Les problèmes n'en seraient que plus présents, plus difficiles à gérer à chaque retour. Il ne fallait pas céder à la facilité. Je voyagerai encore, mais je devais prendre le temps de revenir avant de me lancer dans un autre projet.

Cette phase fut longue de plusieurs mois, mais en constante évolution. Dans l'ensemble je n'étais pas bien, mais je donnais le change, parce qu'il fallait aller travailler et que se renfermer n'a jamais aidé. Je continuais à parler de temps en temps du voyage, mais j'arrivais aussi à parler d'autre chose. Je me réadaptais à la vie d'ici.

Cette étape m'a permis d'intégrer le voyage dans la réalité. J'ai presque revécu tout le voyage à force de souvenirs.
Maintenant il n'est plus dans une autre dimension. 
Les moments du départ et du retour ne se télescopent plus comme au début. Entre, il y a ce voyage, désormais bien réel.




 
Retour - Phase trois:
changements
Environ 5 mois après le retour.

 
La phase trois, contrairement à la phase deux qui s'était sournoisement insinuée, est arrivée d'un coup, sans prévenir.

Un jour, j'ai eu une sorte de déclic. Je me suis posée la question de savoir si je serais vraiment plus heureuse si toutes les choses que je pensais négatives dans ma vie ici disparaissaient.
La réponse était non, pour chacune d'elles. Ça n'aurait rien changé, il y aurait toujours eu autre chose.

Alors j'ai repoussé toutes ces araignées noires et velues et je les ai rangées dans une boîte au fond de mon crâne.
Je ne peux pas dire que la boîte soit totalement hermétique, et il arrive régulièrement que je ressasse, que je sois de mauvaise humeur ou nostalgique. Mais je connais le chemin pour les repousser dans la boîte. Ce n'est pas toujours aisé, mais ça devient chaque jour un peu plus facile.

J'accepte de ne pas toujours aller bien car je sais que ces moments sont éphémères. Et comme je les accepte, ils passent plus vite.
Je sais que je suis capable d'aborder sereinement les difficultés, elles ne me font plus peur.


Bien sûr, certaines choses me manqueront toujours ici: le chaos, la joie de vivre, la couleur, les sourires, la simplicité, la "zen attitude"... mais j'essaye de toujours garder un bout de cela en moi, un souvenir qui me fait sourire, ou me sentir bien. 

J'ai décidé d'être bien, et cette décision ne souffre d'aucune condition. Aucun événement, aucun état, aucun bien matériel, aucune relation ne portera plus le poids de mon bien-être.

De nombreuses personnes nous ont dit que nous allions revenir changées de ce voyage. Mais je ne crois pas que ce fut le cas. Bien sûr, j'ai acquis bon nombre de nouvelles compétences, comme, entre autre, m'adapter rapidement aux changements ou aborder différemment l'inconnu, sans plus de crainte. Mais, au fond, j'étais exactement la même.

On pense que c'est le voyage qui va nous changer, mais c'est un leurre. Il ne fait qu'établir les fondements. Le vrai changement, c'est le retour qui s'en charge!

Voilà pourquoi je pense qu'il ne faut pas fuir son retour en voulant repartir trop vite dans de nouveaux projets de voyage.
Il faut apprendre à rentrer et accepter ce contrecoup.
Se laisser le temps d'intégrer tout ce qu'on a appris et découvert est important pour profiter pleinement de tous les bienfaits qui découlent du voyage.

En apprenant de chaque retour, on profitera mieux de chaque nouveau voyage, plus sereinement, et on abordera à chaque fois mieux cette difficile étape du retour.




6 mois après notre retour, nous avons accueilli en Belgique Raphie, Alice et Fabienne, nos compagnes de routes rencontrées au Laos. 
Ce fut de beaux moments, des moments qui font du bien, des moments qui, l'espace d'un instant, font revivre un bout du voyage.
Ces gens rencontrés en cours de route, qu'ils soient d'ici ou de là-bas, ce sont aussi eux qui rendent cette expérience si riche, si extraordinaire!

 
  










 
Retour - Phase quatre:
retour à la vie et nouveau départ
Environ 11 mois après le retour.

 
La phase quatre du voyage n'en est pas vraiment une. Depuis quelques temps déjà,  la vie a repris. Notre voyage est toujours dans un coin de ma tête, il m'envoie toujours parfois des vagues de nostalgie, mais celles-ci ne sont plus aussi tristes. 
La phase quatre correspond plutôt à un moment, celui où j'ai senti que le temps de construire un nouveau projet était venu. J'ai longuement été tentée de repartir vers des contrées asiatiques connues et appréciées, il est tellement plus facile de repartir vers le connu! Mais je n'ai finalement pas choisi cette voie.
J'ai décidé de partir à la découverte d'un autre continent, l'Amérique du Sud. Ce voyage sera certe de bien plus courte durée mais il s'agit surtout d'une incursion qui me permettra d'appréhender de nouvelles régions et de voir si j'ai envie d'y planifier un voyage de plus longue durée. C'est également un nouveau défi, puisque je testerai le voyage solo.
Quasi un an jour pour jour après notre retour, j'ai pris mon billet d'avion.
D'ici quelques mois, je m'envolerai donc seule pour un mois à la découverte de l'Equateur.

En route vers de nouvelles aventures! 
 
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